Animation 3D, vraiment ?

À l’heure où le moindre gadget de la vie quotidienne s’efforce de faire de l’animation 3D, l’on pourrait croire que la question est tranchée : l’animation 3D est indispensable à la simulation de flux, tout le monde la veut.

Déjà il y a vingt ans* c’était un point de discussion, et j’ai en mémoire qu’on plaisantait alors : « combien de temps regarde-t-on réellement une simu se dérouler sur l’écran ? Ce n’est pas la télé ! ». Certains des arguments de l’époque restent très vrais, avec notamment cette triple question : « quel effort, quel budget, quel temps est-on prêt à consacrer à l’animation 3D d’un modèle ? ».

2D ou 3D ?

L’animation 3D, on la paie forcément : dans le prix d’achat du logiciel pour commencer ; dans l’apprentissage de la couche technique supplémentaire pour savoir chorégraphier les choses ; dans le temps à passer sur chaque modèle pour ajouter la « couche 3D » nécessaire ; dans la durée d’exécution des réplications, qui demanderont aussi un ordinateur de configuration musclée du type « jeux vidéo ». Ce n’est pas un sous-produit obligé de la simulation de flux, tout comme le gruyère râpé n’est pas forcément nécessaire au gratin dauphinois.

Et pourtant c’est bien, c’est beau, on en a besoin, de l’animation 3D : pour présenter le modèle, pour communiquer, pour comprendre rapidement et intuitivement ce qui se passe !

Halte : on a besoin de l’animation du modèle, mais animation 2D ou animation 3D ? L’animation 2D offre sur ce qui se passe dans le modèle un feed-back visuel immédiat, que le modélisateur apprécie en phase de mise au point, et dont l’utilisateur a absolument besoin pour appréhender le comportement global du système.

L’animation 2D de la plupart des logiciels est certes d’un rendu simple, car il s’agit de points ou pavés de couleur qui apparaissent ou se déplacent, de niveaux qui montent et descendent, de chiffres qui se mettent à jour, mais la somme des informations fournies est importante, et peut, si bien réalisée, apporter sur le comportement des flux des résultats synthétiques très précieux, très complets et très parlants.

Parlants, mais pas avec ce réalisme de la 3D, ce sentiment de reconnaissance du système familier qui est si important pour l’adhésion du client final, cette liberté de navigation dans le modèle comme dans la réalité, cette impression de professionnalisme haut de gamme qui se dégage d’une animation 3D bien faite. Je pense à un certain modèle de convoyeurs : waouh, impeccable, on se croirait dans l’atelier, on a tout sous les yeux !… Parce que certaines problématiques de simulation peuvent plus facilement que d’autres se passer de la 3D.

La 3D quand c’est nécessaire

Il existe des systèmes de production dans lesquels tous les mouvements importants sont sur un même plan horizontal et qui peuvent très bien se comprendre vus d'en haut sur un plan à l'échelle. Il y a des process chimiques pour lesquels un diagramme de type logique représentant les réacteurs batch, leur niveau de remplissage et l'étape de production dans laquelle ils se trouvent donneront des informations bien plus pertinentes qu'une représentation en 3 dimensions d'un entrelacs de tubes reliant des bacs de formes et de tailles diverses.

Pour un grand nombre de systèmes de production, j’estime qu'une représentation en deux dimensions, voire même de type logigramme, assez éloignée du la géométrie réelle du système, est non seulement bien plus simple à mettre en œuvre qu'une animation en 3D mais aussi plus pertinente. Ce n'est peut-être pas un hasard si récemment Apple, grand gourou de l'ergonomie, a remplacé les répliques 3D d'interrupteurs par des boutons plats épurés inventant ainsi le concept de « flat design ».

À l'opposé, dans d'autres systèmes, la problématique est bien tridimensionnelle et une animation en 3D s'avère immédiatement plus parlante. C'est par exemple le cas de sites de production comportant plusieurs étages, ou de systèmes de stockage verticaux comportant des étagères ou des robots multiaxes.

Dans d'autres cas encore ce n'est pas la 3D qui importe mais la représentation du fonctionnement du système sur une carte qui va être utile : nous avons présenté cela dans l’utilisation de GoogleEarth.

Une animation cohérente avec le réel niveau de détail du modèle de simulation

En fait je crois que l'animation d'un modèle, qu'elle soit en 3D, en 2D ou même schématique, doit être cohérente avec les objectifs et le réel niveau de détail pris en compte par le modèle fonctionnel.

Par exemple si le modèle prend en compte différentes familles de produits, il est nécessaire qu'une couleur différente soit associée à chaque famille dans l'animation du modèle. Mais intégrer la géométrie exacte du produit en question n'a que peu d'intérêt si cela n'a aucun impact sur le fonctionnement du modèle. Pire, donner une impression de grand niveau de détail avec une animation très soignée alors que le modèle qui est derrière reste simpliste nous semble à la limite de la malhonnêteté intellectuelle.

Pour nous, l'animation d'un modèle doit transmettre de l'information utile, pas servir à manipuler un auditoire.

Dans tous les cas, ceux qui ont vraiment besoin de l’animation 3D de leur modèle de simulation de flux doivent comprendre que si cela peut se révéler payant, c’est aussi payant…

* Gestion de flux en entreprise : Modélisation et simulation, Paris, Hermès (1996), https://editions.lavoisier.fr/economie/gestion-de-flux-en-entreprise-modelisation-et-simulation/ ou sur le site 1Point2

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